La permaculture, en repensant nos modèles de sociétés, nous pousse également à nous interroger à notre rapport à l'argent, véritable sève de nos sociétés humaines.
Une vision de l'argent
J'ai le sentiment que l'argent est souvent mal vu, surtout en France et en particulier dans les milieux alternatifs, c'est la source du mal de notre société. Et pourtant, sans lui, les projets avancent beaucoup plus difficilement...
L'argent peut être vu comme une énergie, à créer, conserver, utiliser, comme n'importe quelle autre ressource. Lorsque l'on regarde comment la nature fonctionne, les plantes pour pousser ont besoin de différents éléments tels que le soleil, l'eau, les nutriments. De la même facon, pour qu'un projet grandisse il a besoin d'énergie, de rêves, de temps d'êtres humains, de compétences, de matériaux... et aussi d'argent, car il permet de faire le lien entre toutes les autres ressources nécessaires!
L'argent peut être vu comme une énergie, à créer, conserver, utiliser, comme n'importe quelle autre ressource. Lorsque l'on regarde comment la nature fonctionne, les plantes pour pousser ont besoin de différents éléments tels que le soleil, l'eau, les nutriments. De la même facon, pour qu'un projet grandisse il a besoin d'énergie, de rêves, de temps d'êtres humains, de compétences, de matériaux... et aussi d'argent, car il permet de faire le lien entre toutes les autres ressources nécessaires!
Comment financer un stage sans discriminer?
Notre problématique ici, au vu de l'état franchement effrayant de notre planète, est à la fois de proposer des stages de qualité, une expérience de vie qui puisse inspirer à imaginer et apprendre à oeuvrer plus efficacement dans le sens d'un monde plus en paix au plus grand nombre en évitant la discrimination par l'accès à l'argent, et à la fois que nous puissions tirer un revenu correct de cette activité.
Par conséquent plusieurs options s'offrent à nous :
- proposer un tarif fixe pour tous : C'est justement ce système qui peut être discriminatoire par rapport à l'accès à l'argent.
- proposer différents tarifs selon les ressources des gens : Ce qui me gène dans ce système est que cela catégorise les gens, et entraîne naturellement les personnes à se comparer, se juger, et peut-être à se sentir dévalorisés, coupables ou incapables de sortir de leur case. Aussi, cela pose la question de qui définit les critères et sur quelles bases justificatives.
- proposer un tarif fixe et garder un nombre de places limitées pour des personnes souhaitant faire du bénévolat en échange du stage : C'est une option que je trouve intéressante à condition que le bénévolat ne se fasse pas durant le stage comme je l'ai déjà vu faire. Je trouve que cela impacte la vie de groupe lorsque certains ont des obligations cuisine et doivent rater quelques cours.
- le prix libre et conscient : C'est ce qui se voit de plus en plus pour l'achat d'objet, assister à des événements ou festivals. Le danger de ce système est que les gens ont soit tendance à considérer ces prestations comme au rabais, soit n'ont aucune notion de ce qu'implique le travail derrière une prestation et donc mettent moins que ce que cela coûte réellement. Cependant c'est un système qui dans certains cas marche extrêmement bien et qui au contraire peut permettre de récolter davantage d'argent que ce que l'on aurait espéré. Je connais une chorale qui grâce à leur concerts pouvaient s'organiser des voyages avec ce système là.
- la co-responsabilité financière : C'est une pratique proposée par Dominic Barter (cercles restauratifs) pour
soutenir consciemment les systèmes, projets et événements sans
conditionner la participation à l'accès à l'argent. C'est d'une certaine facon une sorte de prix libre et conscient, sauf qu'il est clairement explicitement conscient. Dans une société où sont présentes de fortes inégalités de
revenus, elle permet la solidarité entre les participants-es et une
responsabilisation collective. Ce processus repose sur la confiance
qu’une forme d’autorégulation va s’instaurer pour obtenir un montant
global et des contributions qui soient justes pour toutes les parties. C'est pourquoi est annoncé dès l'inscription que l'événement n'est ni payant, ni gratuit. Le montant des frais engagés pour la réalisation du stage ainsi que les projets des organisateurs sont clairements explicités avant que les participants prennent le temps de choisir le montant qu'ils sentent juste de donner.
Avec une nouvelle vision de l'argent, c'est comme si nous devions collectivement nous occuper d'une plante, et chacun décide combien d'eau il souhaite lui donner en fonction de ses réserves personnelles.
Avec une nouvelle vision de l'argent, c'est comme si nous devions collectivement nous occuper d'une plante, et chacun décide combien d'eau il souhaite lui donner en fonction de ses réserves personnelles.
En pratique, comment se déroule le processus de co-responsabilité financière?
- Explication du processus
Le rapport à l'argent de chacun étant différent, la logique de co-responsabilité financière nécessite une explication. Aussi, pour que le don se fasse réellement en conscience et que le participant se sente responsable, il est même fondamental que le financement de l'évènement se fasse en transparence. Ainsi un temps est consacré pour poser des réflexions par rapport à l'argent, l'utilité de l'argent qui dort ou qui sert à épanouir des projets. Ensuite une explication précise des dépenses effectuées et du montant nécessaire aux projets futurs (type crowd-funding) est donnée.
- Le remplissage du panier de contributions
Chacun évalue la somme qu’il-elle souhaite donner en fonction de 2 paramètres principaux :
- Ses propres revenus et sa situation financière
- Le degré de soutien qu’il-elle veut apporter aux intervenants pour ce type de projet ou dans leurs activités.
- Ses propres revenus et sa situation financière
- Le degré de soutien qu’il-elle veut apporter aux intervenants pour ce type de projet ou dans leurs activités.
(Ce qui est intéressant est que le montant donné n'est
pas nécessairement une indication de l'importance qu'on donne au stage :
par exemple donner 10 quand on a 500 pour le mois et besoin de 800 pour
être serein
peut représenter un engagement monétaire bien plus grand que
de donner 500 quand on a 5 000 par mois et besoin de 2 000 pour être
serein).
- Le bilan
Afin de nourrir la réflexion collective, en fin de stage, sont communiqués :
- le nombre de contributions- l'écart entre la plus petite et la plus grande contribution
- le total collecté
Les contributions individuelles ne sont pas communiquées.
Un temps de partage est réservé.
- Le cercle de répartition
La dernière étape consiste à répartir le montant des soutiens là où il sera le plus utile.
Pour cela le montant collecté est écrit sur une feuille de papier autour de laquelle toute personne se sentant impliquée dans le bon déroulé du stage s'assoit. Des personnes ne se sentant pas nécessairement impliqués peuvent aussi y être conviés par ceux qui s'y trouvent déjà. Est ainsi formé le cercle interne des organisateurs.
Un second cercle d’observateurs (de participants par exemple) silencieux pourra entourer le premier si certainEs désirent assister à la répartition.
Une place disponible sera conservée dans le cercle intérieur
pour que quelqu’unE puisse venir s’y asseoir et intervenir s’iel en ressent le besoin.
Tout d'abord est rappelé qui a engagé quels frais et/ou contribué à quoi pour rendre le stage possible et de quelle façon. Peut aussi être exprimé les situations financières de chacun. Pour répartir l'argent, les participants du cercle interne se redistribuent l'argent en inscrivant les montants sur des morceaux de papiers qu'ils ôtent du papier central et qu'ils placent devant la personne qu'ils choisissent en expliquant leur choix. Chaque participant du cercle interne pourra faire autant d'ajustements qu'il/elle veut en expliquant, interrogeant,
réajustant autant de fois que nécessaire jusqu'à ce que tout l’argent soit attribué,
et que touTEs les participantEs soient enthousiastes avec la répartition.
Julia Schindler (avec contributions de Millicent Billette)
Pour aller plus loin:
- Description de la co-responsabilité financière pour le stage de Dominic Barter à Bordeaux en 2019 : http://www.cerclesrestauratifs.org/wiki/Coresponsabilit%C3%A9_financi%C3%A8re
- Conférence "De la participation libre à la co-responsabilité financière" donnée lors des RML12 à Bordeaux, novembre 2018 : https://www.youtube.com/watch?v=OebrOv3tv68
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